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L’ART – CORRIGE DE DISSERTATION- A quoi sert une œuvre d’art ?
L’art est tout d’abord un fait culturel universel: il n’existe pas de société humaine sans qu’une forme ou une autre d’art soit présente (musique, peinture, sculpture, danse, théâtre…). La présence constante du fait artistique semble indiquer une nécessité universelle pour les hommes. Nécessaire, mais pourquoi ? A quoi les œuvres d’art peuvent-elles bien nous servir ?
La question se pose car après tout, l’art ne correspond à aucun besoin primaire : l’homme peut tout à fait survivre sans art. L’art ne serait-il donc qu’un simple « plus », un luxe ? Et si ce n’est pas le cas, en quoi est-il indispensable à l’homme ? L’art doit-il se mettre au service de quelque chose ?
Nous verrons dans une première partie que l’art n’est pas utile à la survie des hommes, et nous distinguerons art et technique. Dans un second temps nous verrons comment l’art est pourtant indissociable du contexte politique et social dans lequel il s’inscrit, et comment on peut mettre l’art au service de toute sorte de fins. Enfin nous tenterons de préciser ce qui fait la spécificité de l’art comme recherche esthétique, et la nécessité fondamentale des œuvres d’art pour l’être humain, en distinguant bien cette nécessité de la notion d’utilité.
L’Antiquité ne distingue pas l’art de la technique : toute production humaine est désignée par le même mot : τέχνη en grec, ars en latin. L’art est tout simplement le savoir-faire et l’habileté manuelle des hommes. Cependant les œuvres d’art sont depuis le XVIIIème siècle distinguées des objets techniques par le fait qu’elles sont destinées à produire une sensation esthétique sur celui qui en est le spectateur ou l’auditeur. La technique est alors la recherche de l’utile, et l’art est la recherche du beau.
L’art est donc défini comme l’activité par laquelle l’homme produit un spectacle ou un objet qui soit beau. Or la beauté n’est pas nécessaire à la survie. Une œuvre d’art ne correspond à aucun besoin primaire, à aucune utilité pratique. Il arrive certes souvent qu’un objet utilitaire soit aussi un bel objet. Des meubles issus de l’artisanat traditionnel, des œuvres de designers comme Philip Starck ou autres en témoignent. Mais on peut considérer que l’esthétique est un « plus » destiné à rendre plus attractif un objet qui serait tout aussi utile et fonctionnel sans cela.
L’art est-il dès lors une occupation parfaitement superflue et vaine?
On pourrait en effet penser que les œuvres d’art ne servent qu’à décorer et à embellir le quotidien, à nous évader et à passer le temps. Le monde imaginaire créé par l’art nous sert à fuir le quotidien, à oublier pour un temps nos soucis. Pour nous détendre, nous allons au concert ou au spectacle, nous fuyons alors la réalité dans les songes agréables que nous dispensent les artistes.
Cependant les œuvres ne sont jamais neutres et hors contexte. Elles agissent sur les hommes.
L’œuvre d’art possède un fort impact social voire politique. L’art peut créer une sensibilité commune entre les hommes. Il peut véhiculer des valeurs. Un peuple se reconnaît dans son art, comme il se reconnaît dans ses croyances religieuses et ses valeurs morales. Les œuvres d’art offrent ainsi à leur époque un miroir dans lequel elle peut prendre conscience d’elle-même. Par exemple, Marcel Duchamp renvoie à l’Europe en guerre l’image de l’absurdité, de la ruine de toutes les croyances antérieures – et aussi l’avènement d’un monde totalement nouveau.
L’art n’est jamais neutre, il véhicule des messages et des valeurs. L’artiste exprime dans son œuvre ses idées par le moyen de sa sensibilité : par des formes, des sons, des couleurs ou des gestes, et non pas par des mots. Un film nous tire des larmes plus facilement que le spectacle de la réalité. L’expression sensible peut avoir un impact beaucoup plus fort qu’un discours, les images frappent les spectateurs bien plus que les mots. L’art peut donc servir à imposer des sentiments ou des idées. Après la seconde guerre mondiale, le cinéma hollywoodien a propagés l’american way of life et les valeurs des Etats-Unis.
Les hommes de pouvoir peu scrupuleux connaissent bien ces pouvoirs de l’art et trop souvent tentent de s’en servir pour assurer leur propagande. Il n’est malheureusement pas rare dans l’histoire de trouver de tels exemples d’œuvres réduites à n’être que les simples vecteurs d’une idéologie religieuse ou politique.
Mais l’art de propagande est-il encore de l’art ? L’art n’a pas pour fonction de plaire, car plaire, c’est déjà manipuler .
La fréquentation des œuvres d’art nous apprend à voir, à sentir, à penser autrement le réel, et non à le fuir. L’art peut être drôle et grave, il peut révéler des sentiments profonds, complexes, refléter ou sublimer nos désirs et nos angoisses. Une œuvre d’art peut être laide, accusatrice, dérangeante ou inquiétante, elle peut dénoncer des injustices, renverser des conventions, flatter les puissants tout en faisant leur caricature comme Goya par exemple, mettre en crise des idées reçues.
Ne devrait-on pas dire alors que l’œuvre d’art sert à révéler des vérités enfouies au cœur même des hommes ? L’œuvre d’art est capable d’exprimer le monde sensible mieux que les mots ne peuvent le faire. L’art n’est pas un simple passe-temps, une activité superflue et vaine, futile et dérisoire : elle implique l’homme dans son être et manifeste sa liberté.
Dès lors, l’œuvre d’art peut aussi déplaire, peut-être même le doit-elle. Cela pour éviter à la fois l’académisme et l’asservissement à la propagande. L’artiste authentique crée ses propres règles, et assume sa position dans le monde.
Au terme de notre analyse, nous avons dépassé à la fois l’idée que l’œuvre d’art soit un simple luxe sans réelle nécessité, et l’idée que l’art se réduise à être au service de quelque chose. Si l’art vaut quelque chose, c’est bel et bien par cette liberté, cette indépendance certes fragile mais fondamentale, qu’il gagne contre les conventions et les manipulations. Il nous apprend à voir, à percevoir autrement. En somme, si l’art doit se mettre au service de quelque chose, c’est de notre liberté.
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Publié par philoturgot
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- Spécial bac 2019, philosophie Washington
Avons-nous besoin d'art? Corrigé de la dissertation du bac de philosophie Washington S 2019
Annales bac de philosophie washington, - annee 2019 -.
Sujets : lecture PDF
Avons-nous besoin d'art?
La raison suffit-elle à connaître le réel?
Commentaire : Freud Malaise dans la civilisation
Correction sujet 1
Désir / besoin : la satisfaction du besoin est nécessaire, celle du désir est contingente
Le besoin est relatif : besoin pour → Kant : impératif hypothétique
Double enjeu du sujet : notre nature : connaître nos besoins, ce qui structure notre existence valeur de l'art : activité gratuite ou liée à des besoins anthropologiques ?
Problème : Art pas lié à notre survie et pourtant grande réticence à l'idée de l'abandonner complètement : pourquoi cette tension ?
Nous n'avons pas besoin d'art pour vivre (= survivre)
a) art = activité gratuite dans son essence. L'art est inutile : Théophile Gautier : « Tout ce qui est utile est laid » L'activité artistique, créatrice ou contemplative, ne remplit aucun besoin vital, ne sert à rien. Les besoins sont d'ordre biologique. Les animaux de pratiquent pas l'art.
b) L'art suppose justement un dépassement de la sphère du biologique. Kant : la contemplation esthétique est désintéressée, elle va de pair avec un abandon des considérations matérielles, elle suppose une attitude de l'esprit qui n'est pas celle de la satisfaction des besoins. L'art est intrinsèquement étranger au besoin.
c) L'art est une activité gratuite, ludique, oisive. Elle est réservée à ceux qui ont les moyens de consacrer leur temps à autre chose que la satisfaction des besoins : elle s'adresse prioritairement aux riches, comme le montrent les prix sur le marché de l'art. Preuve que l'art n'est pas indispensable.
Nous avons besoin de l'art pour certaines actions
a) Valeur didactique de l'art. Peut servir comme outil pédagogique. Peut permettre de donner de la force à un message (politique, moral...). Peut même avoir sa valeur didactique propre, dans des types de savoir / de vérité qui lui sont propres : justesse psychologique, vérités existentielles... (exemples littéraires nombreux)
b) L'art satisfait un désir de communication, d'expression que le langage habituel ne permet pas. Il permet un accès à l'ineffable. Certains états intérieurs, certaines couches de sens dans le monde, ne peuvent pas être exprimées d'une autre manière. Idée de l'art comme langage à part, universel.
Nous avons besoin d'art pour vivre (= mener une existence heureuse et sensée)
a) Précisément nous ne sommes pas comme les autres animaux et avons une conscience, une sensibilité, une intelligence qui diffèrent des leurs. Nous sommes des animaux raisonnables et cela génère une sphère de nouveaux besoins, spécifiques à l'humanité. Le propre de l'homme implique des besoins proprement humains.
b) L'art apaise. L'expérience du malheur est proprement humaine ; le plaisir esthétique vient apporter une consolation elle aussi proprement humaine. Sa force, sa capacité à toucher l'âme le rend indispensable pour affronter les épreuves de la vie. « La musique adoucit les moeurs ». Nietzsche : la création est « le grand remède à la douleur ».
c) Nous avons besoin de sens. L'art (création + contemplation) vient faire advenir ce sens, cette cohérence des choses. Par le sens qu'il porte, il peut transcender l'absurdité de l'existence et nous faire vivre dans un monde où exister en vaut la peine. Il apporte une raison d'être à soi et au monde extérieur. Nietzsche : « sans la musique, la vie serait une erreur ».
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Date de dernière mise à jour : 20/04/2021
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